Pour qu'un stade plus que centenaire ne disparaisse pas dans l'indifférence générale
Pour que le Red Star continue à jouer dans son stade historique
Pour conserver des équipements sportifs au cœur de Saint Ouen
Pour conserver un lieu unique de convivialité et de mixité sociale unissant Paris et sa banlieue
Pour ne pas détruire un monument du patrimoine sportif de la Seine Saint-Denis
Pour ne pas faire disparaître un symbole de la Résistance à l'occupation nazie
Alors nommé « stade de Paris », l'actuel Stade Bauer accueille son premier match le 24 octobre 1909, pour une rencontre Red Star – Old Wesminter (équipe amatrice londonienne)
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1er match, le 24 octobre 1909 |
(Gallica.bnf.fr) |
Le stade fait l'objet d'une inauguration « officielle » le 26 mars 1911, à l'occasion d'une rencontre internationale France – Angleterre (0 - 3).
Le stade devient, dans le langage populaire, le « stade Bauer » après que la rue de la Chapelle longeant le stade se voit attribuer, en octobre 1944, le nom du Docteur Jean-Claude Bauer.
12 ans après sa création en 1897, le Red Star s'installe dans l'actuel Stade Bauer. Il y joue pratiquement tous ses matchs à domicile jusqu'en 1998.
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Le stade Bauer en 1911 (Gallica.bnf.fr) |
Le stade Bauer en 1972 |
Le Red Star quitte alors son enceinte pendant trois ans au cours desquels le club jouera au stade Marville de la Courneuve (1998 à 2002). Cette période, hors de son stade, entraine la chute du club au niveau sportif (passage de la 2ème à la 6ème division) et au niveau financier (dépôt de bilan et rachat du club pour 6 000 euros, en 2003).
Cet exil avait, à l'époque, fait l'objet d'un article dans le journal le Monde :
« LES VÉRITABLES SUPPORTEURS du Red Star, ouvriers des faubourgs parisiens ou nostalgiques du bon temps, en parlent larme à l'œil. Avec ses gradins d'un autre âge, son toit en tôle, ses immanquables poteaux de soutènement et sa vue imprenable sur le Sacré-Cœur illuminé au loin, le stade Bauer mériterait d'être inscrit au registre des monuments historiques du football français. Situé juste derrière le quartier des puces, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), l'édifice est aujourd'hui déserté ».
(Voir l'intégralité de l'article sur Allezredstar.com)
Le retour à Bauer, après le sinistre épisode du stade Marville, marque, au contraire, le retour du club dans les divisions de niveau fédéral (CFA 2, CFA, puis National), la reconstruction d'une véritable politique de formation, ainsi de bonnes affluences lors des matchs à domicile.
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Montée en CFA, en 2006 |
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Red Star - CA Bastia, en 2011, permettant la montée en National | |
(voir la vidéo de l'ambiance après le match) |
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Réception d'un autre club historique du football français, le FC Metz, en avril 2013 |
(voir la vidéo du tifo) |
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Red Star - Fréjus, en mai 2013 permettant le maintien en National, lors du dernier match de la saison |
Le stade Bauer et le Red Star entretiennent une relation de couple tumultueuse, comme le raconte notre ami Lucky'R dans un article publié sur Footnostalgie.
Espérons néanmoins que ce vieux couple survive, une fois de plus et une fois pour toute, au divorce que certains souhaitent aujourd'hui lui imposer.
Le souhait de l'actuelle direction du Red Star de quitter son stade historique fait l'objet d'une opposition de la part du Collectif Red Star Bauer, de l'Amicale Red Star 2000 (association des anciens joueurs du club), et du site AllezRedStar.com.
Suite à l'annonce du projet de départ du Stade Bauer, Mme Paulette DESHAYES a également fait part de son indignation, par un courrier envoyé à M. Pierre LAPORTE, de l'Amicale Red Star 2000.
Pour rappel, Paulette et Gilbert DESHAYES ont tenu, des années durant, le café restaurant « Chez Gil », rue Godillot, à deux pas du Stade Bauer, authentique cantine du Red Star, où se retrouvaient les dirigeants, joueurs, bénévoles et supporters du club. Gilbert a également été Président des supporters, organisant des déplacements, alors que Paulette tenait seule le café restaurant. Lors des matchs à domicile, Paulette et Gil tenaient la buvette du stade Bauer.
Le Stade Bauer est un « stade dans sa ville », à la différence du projet envisagé de déménagement aux Docks.
Dans les années 1950, le stade Bauer accueillait, chaque année, la fête des écoles de Saint Ouen.
En 1963, le stade Bauer a accueilli les états généraux pour le désarmement.
Le stade apparaissait régulièrement sur les cartes postales de la ville de Saint Ouen.
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Années 50 | Années 70 |
En 1998, le lendemain de la victoire de l'équipe de France en Coupe du monde, un bal et un spectacle pyrotechnique ont été organisés au stade Bauer, pour fêter le 14 juillet.
Ces dernières années, différents événements ont été organisés à Bauer, sans lien direct avec le Red Star, démontrant que cet équipement multi-usage peut être utilisé par les Audoniens en dehors des matchs :
Un article, publié en 2009 sur le site du Collectif recensait les services publics (notamment transports), commerces, logements et entreprises environnant le stade Bauer.
L'insertion de cet équipement au cœur du tissu urbain audonien ne doit pas être vue comme un handicap, mais au contraire comme une opportunité pour le quartier, la Ville et le club.
Nous vous invitons à découvrir cet article : « Un stade dans la ville ».
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Équipe première et U7 du Red Star, en mai 2011. |
Dans un article publié en 2009 sur le blog Contre-pieds, hébergé sur Le Monde.fr, les journalistes François Thomazeau et Olivier Villepreux soulignaient avec justesse :
« Le Red Star, club de la porte de Clignancourt, peut être au confluent de deux mondes ; un lieu de jonction entre la créativité, la jeunesse et l'énergie tous azimuts de la proche banlieue, appelée à abolir la frontière tracée par le périph, et la capitale, elle-même fatiguée peut-être de ne représenter que les lieux de décisions.
Le stade s'inscrit dans un projet d'urbanisme plus large, ce « Grand Paris » aussi flou dans ses limites que dans ses motivations. Autant s'y atteler concrètement dès maintenant à l'échelle locale, via un stade et un sport qui peuvent rendre le projet ludique, festif, solidaire. La réussite de l'entreprise sert le football autant que les populations du XVIIIe arrondissement et des abords du stade, qui deviendrait un lieu d'attraction original. »
Une telle ambition est amenée à être abandonnée si le Red Star devait quitter son site actuel, situé à proximité des puces, à égale distance de la porte de Clignancourt et de la Mairie de Saint-Ouen, à la frontière du XVIIIème arrondissement de Paris et de Saint-Ouen.
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Nulle part ailleurs qu'à Bauer, les différentes générations ne peuvent se réunir autour de leur passion commune. |
Un reportage vidéo (réalisation Benoît Ferreux) illustre à merveille cette convivialité et cet état d'esprit rare dans le paysage footballistique français :
En 1978, alors que le Red Star déposait le bilan, le journaliste Jean Eskenazi écrivait les phrases suivantes qui sont plus que jamais d'actualité :
« Avec la disparition du Red Star Pro, le football français vient de s'enlever une grande romance populaire. Le vieux Stade de Paris était resté un des rares endroits où soufflait encore l'esprit du football. Ce n'était pas un rendez-vous pour Snobs. Ce n'était pas Paris. C'était mieux. C'était Paname ».
(Source : Dictionnaire historique des clubs de football français - Pages de Foot, 1999).
Ce n'est pas en 1998, avec l'inauguration du Stade de France, mais en 1911 et à Saint Ouen que l'Equipe de France de football a joué pour la première fois dans l'actuelle Seine-Saint-Denis (encore département de la « Seine », à cette époque).
Le stade « officiel » de l'Equipe de France, lorsque celle-ci jouait à domicile était, en effet, l'actuel Stade Bauer, alors Stade de Paris, de 1911 à 1914.
La France y a connu, le 9 avril 1911, son deuxième match contre l'Italie et son premier à domicile soldé par un nul 2-2, après une défaite 6-2 à Milan.
C'est également à Bauer que la France bat pour la première fois la Squadra azzura à domicile 1-0 après s'être imposée 3-4 à Turin.
Plus d'information sur allezredstar.com
Ce stade a également accueilli d'illustres clubs européens lors de rencontres telles que :
Red Star - Tottenham Hotspurs en 1913, score 1 but à 2.
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(source : Allezredstar.com) |
Stade de Reims – Juventus de Turin le 14 juin 1959, score 3 buts à 4.
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(source : Allezredstar.com) |
Le Stade Bauer accueillit, enfin, la Seleção, à quelques semaines de la Coupe du monde 1998 pour un match amical face à l'Andorre.
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(source : Allezredstar.com) |
Composition de la Seleção lors de son
match au stade Bauer, le 3 juin 1998 :
Entraineur : Zagallo
Vidéo du match :
Score final :
Bresil : 3 - Andorre : 0
(Giovanni, Cafu, Rivaldo)
De par son nom, le Stade Bauer rend hommage au docteur Bauer ainsi qu'à son épouse, Marie-Jeanne.
Rappelons, qu'aujourd'hui encore, le nom officiel du stade est celui de « stade de Paris », mais depuis fort longtemps, ses habitués le désignent du nom de « Bauer ». Cette dénomination n'est pas seulement due à sa localisation, le long de la rue du Dr Bauer. Il s'agit également de saluer la mémoire de deux personnes dont le destin a basculé lors de la seconde guerre mondiale.
Médecin à Saint-Ouen, Jean-Claude Bauer a appartenu à plusieurs groupes de Résistants avant d'être arrêté par la police française, livré à la gestapo, torturé, puis fusillé au Mont Valérien le 23 mai 1942. C'est en octobre 1944, que le comité local de libération attribue son nom à l'ancienne rue de la Chapelle. Son épouse, Marie-Jeanne Bauer, infirmière et Résistante sera également arrêtée et survivra à sa déportation à Auchwitz.
Rien de plus normal que d'associer le stade du Red Star à des héros de la résistance puisque le club a également compté parmi ses joueurs, l'un des membres du groupe Manouchian.
Photo : Archives de la
Mairie d'Argenteuil
Rino Della Negra, fils d'immigré italien, joue à Argenteuil avant d'intégrer le Red Star. Lorsqu'il n'est pas en match ou à l'entrainement, il lutte contre l'occupant au sein des FTP - branche « Mains-d'œuvre immigrée » (MOI) dirigée par Missak Manouchian. (Voir, à propos du film réalisé en 2008, par Robert Guédigian sur le groupe Manouchian et l'affiche rouge, « L'armée du crime »).
Les activités de Rino Della Negra et de ses compagnons est de prévenir les juifs des rafles nazies, ainsi que l'attaque de casernes, des déraillements de trains, des embuscades contre les patrouilles de soldats allemands. Rino a ainsi participé à l'exécution du général Von Apt, à la destruction du siège du parti fasciste italien ainsi qu'à l'attaque de la caserne Guynemer de Rueil.
Photo : Archives de la
Mairie d'Argenteuil
De génération en génération, les supporters du Red Star se transmettent l'anecdote selon laquelle les vestiaires du stade Bauer servaient de cache d'armes au groupe Manouchian.
Lors de l'attaque d'un convoyeur de fonds allemand, Rino sera blessé d'une balle dans le dos et capturé par la gestapo pour être torturé. Il sera fusillé au fort du mont Valérien le 21 février 1944 avec les 23 membres du groupe Manouchian.
(En savoir plus sur Rino Della Negra : lien 1 et lien 2).
Avant d'être exécuté, il écrira une lettre à son petit frère dans laquelle il lui demandera d'envoyer « le bonjour et l'adieu à tout le Red Star ».
Je veux t'envoyer un dernier petit mot pour que tu réconfortes de ton mieux Maman et Papa.
Tu es fort et robuste et je te sais courageux et c'est pourquoi je ne veux pas de larmes, t'as compris, hein mon vieux.
Je n'avais jamais pensé au mariage, c'est pourquoi les parents ont du chagrin, car j'avais l'intention de finir mes jours avec eux. Tu peux me faire plaisir en te sachant toujours près d'eux et de toujours les aider de ton mieux. C'est ton tour.
C'était le mien aussi, mais je n'ai jamais été très chanceux. C'est tout ce que je voulais te dire.
Remonte le moral à tout le monde et tout finira pour le mieux. Je veux que tu ailles chez tous les copains : Toni, Marius, Dalla, Keyla, Avante, Dédé, Papou, Cari, chez Inès en souhaitant le bonjour à tous les copains et les copines de Mara
Embrasse bien fort tous ceux que je connaissais. Tu iras au Club Olympique Argenteuillais et embrasse tous les sportifs du plus petit au plus grand. Envoie le bonjour et l'adieu à tout le Red Star.
Je veux que tu ailles embrasser pour moi, toute la famille Barbera, Vincent, Paulette, Claudie, la Mater et le Pater, Thomas et Angèle et tout l'hôtel Parisis, chez la grand'mère à Yiyi, chez Sola et Raymond, chez Georges, chez Mario, chez Gilles, chez Bernard et chez tout le monde.
Embrasse bien Yiyi quand il reviendra et Dédé Grouin. Va chez Toni et faites un banquet.
Enfin, faites tout pour le mieux.
Je finis en t'embrassant bien fort, et courage. Ton grand frère qui t'aime toujours.
RINO. »
Son sacrifice pour la lutte contre le nazisme est commémoré depuis 2004 par la Ville de Saint-Ouen, le Red Star et le Collectif Red Star Bauer (lien 1 et lien 2).
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Mme le Maire, Inès Tonsi et Sylvain le frère de Rino Della Negra. Hommage de la ville de Saint-Ouen en 2004 |
Plaque commémorative posée depuis 2004 à l’entrée du Stade Bauer. Elle est fleurie chaque année par le Collectif. Qu’en sera-t-il en cas d’abandon du stade ? |
Conférence, en février 2013, « une Etoile Rouge ne meurt jamais », avec la présence d'Inès Tonsi, agent de liaison de Rino Della Negra, suivie du fleurissement de la plaque hommage, puis d'un match en son honneur.(Compte rendu)
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On dit souvent que les jeunes générations ne se préoccupent pas des événements du passé. Mais au Stade Bauer, les supporters du Red Star, quel que soit leur âge, perpétuent et revendiquent les idées antifascistes des anciens :
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« Hier, aujourd'hui, demain… BAUER : BASTION ANTI FACHOS » Banderole déployée par les supporters du Red Star, le 2 avril 2011. |